URSS puis Russie : de quoi parle-t-on ?

Cet article est donc le 1er d’une petite série pour clarifier les esprits autour des conflits en Ukraine de 2022.

Sans remonter au-delà de la fin de la 2ème Guerre Mondiale – ceci fera l’objet d’un autre article – voici une description simplifiée de l’évolution géopolitique de l’URSS depuis 1945

Situation initiale 1945

Staline gouverne d’une main de fer jusqu’à sa mort le 5 mars 1953 une union comportant 15 républiques soviétiques créée à la suite de la Révolution de 1917. C’est un pouvoir autoritaire centralisé, entre les mains du seul Parti communiste, qui donne la priorité au secteur militaro-industriel.

Bien que chaque république ait sa propre administration fédérale, tous les appareils (législatif, exécutif ou judiciaire), ainsi que la presse et la société civile dans son ensemble, sont directement soumis à l’autorité de ce parti unique et de sa police politique (successivement Tchéka, GPU, NKVD, MGB, KGB, FSB…), rendant factice l’autonomie constitutionnelle des républiques fédérées et autres entités autonomes.

Les spécificités propres à certaines républiques (Géorgie, Ukraine) ainsi que certaines républiques et oblasts autonomes (Ossétie…) feront l’objet d’un article spécifique.

Se succèdent à la tête du parti, les secrétaires généraux suivants :

  • 1917-1922 Vladimir Ilitch Lénine
  • 1922-1953 Joseph Staline
  • 1953-1964 Nikita Khrouchtchev
  • 1964-1982 Léonid Brejnev
  • 1982-1984 Iouri Andropov
  • 1984-1985 Konstantin Tchernenko
  • 1985-1991 Mikhaïl Gorbatchev

Coincés entre l’URSS et l’Europe, et bordées par le «Rideau de Fer» – dont une partie est appelée «Mur de Berlin» – se trouvent les républiques satellites de l’Europe de l’Est sous influence soviétique, appelé communément avec l’URSS, Bloc de l’Est :

  • Albanie
  • Allemagne de l’Est (ou RDA)
  • Bulgarie
  • Hongrie
  • Pologne
  • Roumanie
  • Tchécoslovaquie
  • et Yougoslavie.

Entre 1945 et 1948, le parti communiste prend le pouvoir dans tous ces pays, devient parti unique en éliminant ou en absorbant les autres partis, et met en place un régime se réclamant du communisme, calqué sur celui de l’Union soviétique. Même la Tchécoslovaquie, pourtant république démocratique, bascule dans le monde communiste lors du “coup de Prague” en février 1948, sous la pression soviétique. Pendant les quarante années qui suivent, ces pays connaissent un réel développement économique, mais surtout dans les domaines de l’industrie lourde, de l’armement et de la conquête spatiale. En revanche, l’agriculture, les industries de transformation et les services connaissent de graves difficultés, de sorte que le niveau de vie de la majorité des citoyens qui n’appartiennent pas à la nomenklatura reste très inférieur à celui de l’Ouest.

Premiers signes de crise

Ces difficultés économiques, conjuguées avec les restrictions des libertés, entraînent de violentes crises

  • en RDA en juin 1953: soulèvement populaire à Berlin pendant 2 jours qui se terminera par une déroute des manifestants suite à l’intervention des troupes soviétiques et une répression sévère. L’Occident ne réagit pas.
  • en Tchécoslovaquie en juin 1953 : émeutes ouvrières
  • en Pologne «octobre polonais» 1956 : révolte ouvrière
  • qui influença fortement l’insurrection de Budapest en Hongrie en octobre 1956 : plus de 2500 hongrois et 700 soviétiques furent tués.

Khrouchtchev assouplit sensiblement le régime stalinien et introduit des réformes qui améliorent les conditions de vie de la population, mais n’apportent pas sur le long terme de solution durable aux problèmes économiques et sociaux.

Chute des régimes communistes de 1988 à 1991

A partir de 1986, en cohérence avec le droit des peuples à l’autodétermination garanti par les Bolcheviks en 1903, commencent quelques velléités d’indépendance et de contestations exprimées formellement sous forme de manifestations étudiantes ou partisanes. Elles sont facilitées par une libéralisation du régime soviétique initiée par Gorbatchev et revendiquent un moindre contrôle du gouvernement central. Pour certaines républiques, le processus aura duré plusieurs années.

Au cours de ces évènements, ressortent des différences ethniques et historiques majeures entre peuples se dressant les uns contre les autres. La Russie soutient ces mouvements séparatistes, souhaitant jouer un rôle d’arbitre: Abkhazie (1989), Haut Karabakh en 1991, Ossétie du Sud (1992), conflits que l’on retrouve encore aujourd’hui.

En parallèle, ont lieu la révolution de la Hongrie (ouverture du Rideau de fer) et de la Roumanie en 1989 et l’élection de Lech Walesa à la présidence de la Pologne en 1990.

Hongrie

Après la 1ère tentative en octobre 1956,  la Hongrie autorise le démantèlement du rideau de fer à la frontière autrichienne en mai 1989. La République populaire de Hongrie est remplacée par la nouvelle république de Hongrie.

Elle adhère ensuite à l’OTAN en 1999 et à l’Union européenne le 1er mai 2004.

Roumanie

Une série d’émeutes et de protestations qui se déroulèrent en décembre 1989  aboutit au renversement et à la mort du dictateur communiste Nicolae Ceaușescu et de son épouse : plus de 1000 morts. Cet événement inaugure le début de la métamorphose du régime communiste en démocratie parlementaire, et de la nomenklatura en une bourgeoisie libérale.

C’est avec la Russie le seul pays qui aura subi de lourdes pertes lors de la chute des régimes communistes.

Pologne

A la fin de la 2eme Guerre Mondiale, le pays retrouve des frontières similaires à celles du 13ème siècle.

Après la 1ère tentative en octobre 1956, de violentes révoltes éclatent à nouveau dans le pays entre 1970 et 1980. Après la création du syndicat Solidanorsc en 1980, les grèves et les manifestations ne faisant que s’amplifier d’année en année.

Le 1er janvier 1990, la IIIe République est proclamée. Des élections présidentielles sont remportées par Lech Wałęsa, mais l’instabilité politique demeurera avec plusieurs gouvernements.

Rapprochement de la Pologne de l’OTAN en 1999 et de l’Union européenne en 2004.

S’ensuit la dislocation de l’URSS

Gorbatchev est alors Président de l’URSS

La 1ère république soviétique à se séparer de l’URSS est la Lituanie en 1990, sanctionnée par un blocus économique de l’URSS. Suivies la même année par l’Estonie et la Lituanie. Elles furent admises à l’ONU en septembre 1991.

Le 12 juin 1991, la Russie se déclare indépendante, son président est Boris Eltsine. Il organise un putsch en envoyant Gorbatchev en Crimée… raté. Mais il dépossède progressivement Gorbatchev de tous ses pouvoirs.

Le 24 aout 1991, l’Ukraine se déclare indépendante

D’août à décembre1991, les quinze républiques soviétiques, Russie comprise, ont dénoncé le Traité sur la création de l’URSS.

Le 8 décembre, 3 républiques (Russie, Ukraine et Biélorussie) signent les accords de Belaveja, confirmés le 21 par onze autres avec les accords d’Alma-Ata établissant officiellement la CEI et déclarant que l’URSS avait cessé d’exister, les républiques soviétiques se déclarant indépendantes les unes après les autres.

Le 25 décembre, Gorbatchev démissionne et remet les clés à Boris Eltsine, (Fédération de Russie).

C’est la fin de la Guerre Froide

Mais 25 millions de russes se retrouvent dans les Etats postsoviétiques.

la CEI : Communauté des Etats Indépendants

Les 3 pays baltes étant indépendants, la CEI est composée des 11 autres dès sa création ; la Géorgie ne rentrera qu’en 1993, sous la pression de la Russie dans le cadre du cessez-le-feu entre la Géorgie et l’Abkhazie.

Les armes nucléaires soviétiques étant présentes sur 4 républiques, il est convenu par les accords de Minsk de les déplacer sur le sol russe dans un délai de 6 mois, ce qui a été fait.

Création de l’OTSC en 2002, nous en reparlerons dans l’article sur l’OTAN

Le fonctionnement de la CEI n’est pas parfait

  • La Russie sensée avoir un pouvoir unificateur est controversée par sa brutalité lors de la 1ère guerre de Tchétchénie
  • un courant conservateur et eurasiste favorable à un contrôle fort voire à la ré annexion de certains de ces territoires se développe au Kremlin qui provoque la méfiance des dirigeants de ces nouveaux États et empêche finalement que la CEI ne devienne une communauté d’États forte selon un modèle proche de celui des Communautés européennes.
  • Les résolutions, accords et traités ne sont pas appliquées
  • la Géorgie quitte en 2008 et l’Ukraine en 2014 après la crise de Crimée

La CEI est devenue essentiellement une enceinte de dialogue entre pays de l’ex-Union soviétique, disposant d’un contenu économique, militaire et politique limité : de nombreux accords bilatéraux de libre-échange ont toutefois été signés entre les membres et les accords concernant des politiques extérieures ou de défense communes sont également fréquents.

Cependant, incapable de s’affirmer sur la scène internationale, en proie à des luttes intestines alimentées par les tendances hégémoniques de la Russie et sécessionnistes de certaines républiques, la CEI ne parvient pas à être le fer de lance d’une nouvelle unité économique et politique.

De 1991 à aujourd’hui : les frontières

La question des frontières est centrale dans la conscience collective russe. Durant l’Empire, elles n’ont cessé d’évoluer, le plus souvent dans le sens de l’agrandissement du territoire.

A l’intérieur du pays, beaucoup de Russes ne se reconnaissent pas dans les frontières de 1991

  • Crimée rattachée à l’Ukraine
  • Le Donbass
  • Pays Baltes

et plusieurs communautés ethniques réclament une plus grande autonomie ou aspirent à la sécession pure et simple

Hors des frontières, la Russie veut montrer aux minorités qu’elles ne sont pas oubliées. On y trouve les plus grandes diasporas russes :

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